Conférence Cyberpunk Edgerunners à Japan Expo 2023

Parmi les animations de Japan Expo 2023 s’est tenue une conférence sur Cyberpunk Edgerunners, l’anime adapté du jeu vidéo Cyberpunk 2077 qui a tant fait parler de lui. Ce n’étaient pas moins de quatre intervenants qui ont été invités pour cette table ronde :

• Tsutsumi Naoko, productrice de l’anime chez le studio Trigger
• Saya Elder, productrice d’animation chez CD Projekt Red
• Bartosz Sztybor, directeur narratif de l'animation
• Yoshinari Yoh, character designer chez Trigger

La veille, l’anime a d’ailleurs été nommé Daruma d’Or du Meilleur Anime de l’Année, la remise du prix a été effectuée en direct par l'animatrice.
Aucune photographie n’était autorisée lors de cette animation toutefois, donc je ne pourrai pas vous partager les éléments visuels diffusés en direct. Et attention, certains passages de la conférence spoilent la série.

1) Le défi de la réalisation de cet anime

Yoshinari : Cyberpunk était déjà un grand titre avant même sa sortie, le succès était garanti. Donc on avait déjà une forte pression pour créer la version animée, mais je suis très fier du résultat.

Tsutsumi : Au Japon, souvent les collaborations avec les sociétés étrangères ne se passent pas très bien, mais là, il y a eu une bonne communication, cela s’est très bien déroulé avec un respect de nos volontés.

Elder : C’était une première pour notre studio de créer un anime et les membres de l’équipes y participant devaient toujours passer par des traducteurs, ce qui donnait des réunions de trois ou quatre heures.

Sztybor : Le début a été très difficile avec l’égo de chaque équipe avec les cultures, mentalités, méthodes de travail différentes. Cela a été un grand défi d’autant plus que pendant la pandémie mondiale, nous ne pouvions pas nous parler directement, c’était difficile de réussir à se comprendre mais c’est au final un projet réussi et la naissance d’une grande amitié.

2) D’autres idées de fin pour la série

Sztybor : Nous savions que la série allait finir comme ça pour David et Lucy.

Elder : C’est la première fois que nous allons mentionner nos idées de fins alternatives. On savait que la série aurait un ton noir, mais le studio Trigger voulait une fin satisfaisante pour le public : une idée envisageait que Lucy tombât enceinte mais elle a été refusée.

Sztybor : Une autre possibilité était que David fût enrôlé par Arasaka en tant que mercenaire au Cambodge et y mourût au combat, dans la tristesse. Trigger nous a répondu « Non, vous êtes des cyberpsycho, on ne peut pas laisser faire ça ! ».

3) L’épisode 6 se démarque des autres, une différence intentionnelle ?

Tsutsumi : Chaque épisode est dirigé par un animateur différent qui officie comme réalisateur, il s’agissait d’Igarashi Kai pour l’épisode 6, au storyboard et à l’animation, nous avons respecté ses volontés.

Sztybor : C’est mon épisode préféré, il est réalisé par un triptyque d’artistes : Imaishi [Hiroyuki, le réalisateur de la série], Yoshinari et Ikarashi.

Tsutsumi : Imaishi et Yoshinari avaient donné carte blanche à Ikarashi.

Sztybor : La question est de savoir où s’arrête la liberté créative, les artistes échangent alors pour se cadrer et garder une cohérence.

Tsutsumi : À ce moment, la situation était devenue plus compliquée et Imaishi et Yoshinari, très occupés, ont délégué alors la réalisation à Ikarashi. Le réalisateur a toujours le dernier mais la compétence d’Ikarashi fait que ses idées ont été acceptées.

4) Le temps de production de l’anime

Sztybor : L’idée est venue cinq ans avant la sortie de la série. Un fan d’animes dans notre équipe a proposé cette idée d’en faire un anime, nous en avons discuté durant un an puis nous avons contacté Trigger. Le travail de scenario a ensuite duré deux ans, nous avions une idée très précise d’histoire sombre et triste tandis que Trigger en voulait une plus joyeuse, cela a engendré beaucoup de discussions pour se mettre d’accord.

Tsutsumi : En 2017 a démarré la planification, la production en avril 2021. Le travail d’animation a duré cinq ans, ce qui est très rare de prendre autant de temps.

5) Anecdotes à raconter

Yoshinari : J’aime bien les personnages de David et de Lucy. À part eux, dans l’épisode final la scène entre Falco et « Ojisan » permet de donner un peu plus de rôle à Falco qui n’en a pas beaucoup eu dans la série. [Yoshinari durant la conférence, réalisait un dessin en direct du personnage]

Sztybor : J’aime la scène de l’ambulance dans l’épisode 2 entre David et Lucy. Avant, j’avais l’impression qu’il manquait des scènes montrant le moment où les deux tombent amoureux, ce passage a donc comblé ce manque. Quand j’ai écrit cette scène d’ambulance et de course-poursuite, tout le monde était effectivement d’accord qu’il manquait quelque chose sans cette scène.
Quand Dorio frappe Maine puis l’embrasse, au départ ce n’était pas dans le script. Je n’étais pas content au début mais j’ai finalement aimé cet effet de surprise.

6) Respecter à la fois les univers de Cyberpunk 2077 et du studio Trigger pour la création des personnages

Tsutsumi : Au début nous devions commencer la production après la sortie du jeu. Les premiers croquis préparatoires étaient faits mais il y avait un manque de clarté. Il nous a fallu quand même travailler avant la sortie du jeu et nous avons eu besoin de démo jouables pour comprendre l’univers et démarrer la production de l’anime. Au moment de la sortie du jeu, il y a eu des inquiétudes à l’idée que l’anime ne soit pas sorti en même temps.

Elder : j’ai vu Imaishi jouer au jeu, il préférait jouer avec un marteau plutôt qu’un pistolet et a été l’un des rares à avoir tenté une romance dans le jeu avec un personnage masculin.

Yoshinari : Le personnage de Rebecca dans le gang Maelstrom a nécessité beaucoup de modifications. J’ai été très impressionné par le nombre de designs de personnages déjà présents dans le jeu. En jouant, certains personnages qui avaient l’air a priori menaçant se sont révélés amicaux. J’ai voulu ainsi mettre l’accent sur leur côté sympathique.

7) Les chemins de vie empruntés par chacun et chacune durant leur partie de Cyberpunk 2077

Yoshinari : J’ai commencé en tant que Corpo, mais j’ai abandonné pour passer Nomad. J’avais choisi Corpo au départ en raison de mon expérience en tant que salarié.

Tsutsumi : J’ai commencé aussi en Corpo, mais j’ai abandonné le jeu pour laisser mes collègues jouer. Quand CD Projekt Red a apporté les premiers kits de jeu, je m’amusais à attaquer des postes à la hache.

Elder : En tant que productrice j’ai choisi Corpo, il n’y a rien de plus corporate ! Imaishi pour sa part avait choisi Enfant des Rues mais après l’achat du jeu, il a peut-être choisi autre chose.

Sztybor : Ayant moi-même été un gosse des rues, j’ai naturellement choisi la voie Enfant des Rues.

8) Quelles possibles futures collaborations

Yoshinari : Si nous travaillons de nouveau sur Cyberpunk 2077, j’aimerais recréer Cyberhand.

Tsutsumi : Avec cet anime, nous avons réalisé une œuvre qui ne pouvait pas passer à la télévision, j’aimerai le refaire afin de pouvoir élargir notre éventail de travail.

Elder : Je ne pensais pas qu’il y aurait le temps pour répondre à cette question, je n’y ai pas réfléchi sérieusement. Il n’y a pas de projet caché de prévu, juste des blagues de projets racontées en coulisses comme par exemple réaliser la saison 2 d’Host Club Ouran High School !

Sztybor : Nous ne travaillerons plus jamais ensemble, nous nous haïssons maintenant ! Haha je blague bien sûr, les équipes s’apprécient. Après cet anime sombre, j’aurais envie de quelque chose de plus joyeux comme une histoire d’amour entre petits animaux. Une autre idée blague serait de réaliser un hentai avec Cyberware !

Sur ces bonnes paroles s’est conclue la conférence. La présentatrice a vivement encouragé le public à revoir l’anime, ou bien à le voir pour la première si ce n’était pas fait (elle semblait avoir omis que la conférence spoilait en partie la fin de la série, donc n’ayant pas vu l’anime personnellement, il va falloir que j’attende un moment le temps d’oublier ce qui s’est dit durant cette table ronde pour m’y attaquer  )