UQ Holder !

Après Love Hina (comédie / harem avec un peu de baston) et Magister Magi Negima (mélange de harem et de baston), Ken Akamatsu nous propose ici un manga de baston, avec un peu de harem. Une évolution palpable, donc, d’autant qu’ici, comparé aux tons comiques de ses précédentes œuvres, c’est un ton assez sombre et violent qui s’impose assez vite. C’est pas Berserk non plus, certes, mais… mais…

Le thème central de ce manga est l’immortalité. On l’a déjà vu sous la plume du mangaka : le héros de Love Hina, Keitarô, était souvent qualifié en rigolant d’immortel, quand il survivait aux dégâts cartoonesques qui lui étaient infligés. Puis dans Negima, on a commencé à voir quelques personnages à la grande longévité, ainsi que les conséquences vis-à-vis de leur entourage et de leur rapport au monde. Ici, la notion prend encore plus de place. Les personnages bénéficient de différentes catégories d’immortalité, et doivent en prendre compte dans les combats (même si on ne tue pas un immortel, on peut lui faire mal, le sceller, l’envoyer très loin etc.). On peut voir aussi leurs différentes façons d’aborder la vie, le rapport aux mortels, et aux autres immortels. Et le bilan n’est pas franchement positif : on voit dès le début un personnage confronté à la disparition de ses amis humains, et le tout premier combat est d’une grande violence, l’endurance des personnages permettant à l’auteur de les démembrer et mutiler sans remords. Des personnages qui mettaient des grosses baffes à la Obélix se mettent à frapper pour tuer. Les blessures sont censurées, on ne voit pas de la tripaille voler partout, mais comparé à l’ambiance des précédentes œuvres de l’auteur, ça fait un choc. L’ambiance y est plus sombre, plus oppressante ; même l’univers est plus proche du cyberpunk que du merveilleux. Néanmoins, le manga distille parfois subtilement le message que, plus l’adversité est dure, plus la victoire qui la suit y est éclatante ; il est donc possible que l’histoire prenne un virage plus positif sur la fin.

En termes d’histoire, UQ Holder suit un bon nombre de codes du manga de baston. Le héros est un héros de shônen assez typique (même si l’ambiance est davantage seinen), un peu moins bébête que la moyenne mais d’un optimisme indécrottable. Il dit ne veut pas avoir envie de se battre, mais suit quand même les traditionnels entrainements infernaux auprès de maîtres bizarres, et entre dans des tournois d’arts martiaux. L’intrigue devient plus complexe quand elle commence à raccrocher celle de Negima (jusqu'à se présenter comme sa suite directe), et les fans de ce dernier manga devraient au moins lire le tome 15 de UQ Holder, où sa « vraie » fin est ENFIN racontée. L’auteur finit d’ailleurs, après une centaine de chapitres, à refaire un peu de harem, parfois de façon plus gênante qu’avant (genre avec des petites filles prépubères). Mais la nouveauté, c’est qu’il finit par introduire des passages de romance plus sincères, même si l’humour n’en est pas absent. Et là, il devient souvent touchant.

Quant au dessin, il est très abouti, avec notamment des décors somptueux. On a affaire à un mangaka aguerri, et le progrès du trait est palpable, surtout quand d'anciens personnages réapparaissent. Il y a moins de fan service qu'auparavant, mais certains personnages continuent à se sacrifier pour la cause, avec un beau dévouement (il faut dire que les personnages sont plus résistants que leurs vêtements)

Il m'est donc difficile de juger UQ Holder en lui-même, sans le comparer ou au moins le relier à Negima. Le changement d'ambiance est d'emblée un peu déprimant, on perd la part d'exotisme et de merveilleux du prédécesseur (même si ceux qui le trouvaient nunuche apprécieront peut-être davantage la suite), mais le nouvel univers, ses diverses innovations et les thèmes qui s'en dégagent ont leur force propre. D'ailleurs, on sent l'auteur parfois hésiter entre réutiliser d'anciens personnages ou mécaniques, ou continuer à construire les nouveaux (au prix de quelques maladresses d'écriture : doublons, introductions peu utiles...). C'est le nouvel univers qui finit par l'emporter, et tant mieux, car on finit par s'y attacher.

 

Chaton ubiquite, à jour de publication, le 24/03/21