Ballade de Narayama (La) [Imamura]

Dans ce village, pas de place au sentimentalisme. Les habitants ont déjà bien assez à faire avec le quotidien et leur survie, n’ayant que peu de ressources et devant ne rien gâcher. Dans ce contexte, notre héroïne est bien décidée à suivre la tradition : partir mourir en montagne. Après tout, cela fera une bouche de moins à nourrir. Mais avant ça, il reste beaucoup de choses à gérer, dont certaines ne sont pas jolies jolies.

On pourrait croire que le film présenterait une histoire douce mélancolique, avec des habitants soudés malgré la pauvreté et s’efforçant à accompagner cette grand-mère dans sa volonté de mourir. S’il comporte bien quelques moments tranquilles de pure tranche de vie, le film se révèle souvent très cru, irrévérencieux, voire brutal et malsain par moment. On découvre pas mal de personnages – j’admets avoir été un peu paumée par moments à resituer qui était qui à part quelques personnages principaux – ainsi que leurs rapports (oui dans les deux sens du terme). Certains seront des individus plus ou moins recommandables et personne n’est vraiment à l’abri de commettre un acte répréhensible ou d’en subir. D’ailleurs, le réalisateur compare souvent ses personnages à des animaux (les antispécistes répliqueront qu’il n’y a aucun mal à cela, mais on sait bien que dans ce film, l’intention est clairement péjorative).

J’ai du mal à accrocher, bien que le film soit de qualité, sans doute le côté antipathique de bon nombre de personnages m’a rebutée. De plus, la qualité de l’image et du son du DVD étaient relativement médiocres, si bien que parfois je devais rejouer plusieurs fois un passage pour comprendre ce qu’il se tramait. Peut-être que la version remasterisée par The Jokers résout ces soucis, je le souhaite.

Le film n’est pourtant pas composé que de moments rudes, mais ceux-ci m’ont davantage marquée et c’est surtout ce que j’en retiendrai. En particulier une scène qui m’a glacé le sang :

À partir de là, j’ai eu du mal à considérer le film sous un autre angle que la terreur. Même le dernier acte narratif, censé être plus poétique malgré la tristesse, ne m’a guère plus inspiré de douce chaleur. Pourtant, le réalisateur y mis les formes, afin de mettre en valeur la beauté de la nature, avec de somptueux plans et lumières. Mais rien n’y fait, seule la cruauté et le vice m’auront marquée.

La Ballade de Narayama ne sera clairement pas une douce amère mélodie mais un concert tonitruant. À réserver à un public averti.

Hanoko, le 14/05/2023