Mika – Mardi 31 mai 2005, à 00:00

Coq de combat

Ryô Narushima a 16 ans, est un étudiant brillant, il mène une vie confortable et sûre, jusqu’au jour où il assassine ses parents. Dès lors il est envoyé en prison, où il devra purger une peine de 2 ans ferme. Il y subira dès son arrivée des sévices sexuels et des humiliations. Seulement Ryô, bien que chétif et pas très courageux, ne compte pas se laisser faire. Et grâce aux cours de Karaté donné une fois par semaine aux jeunes prisonniers, Ryô parvient à se défendre. C’est d’ailleurs sa seule lumière dans cette prison, et ce qui lui permettra de garder un espoir de survie dans ce monde nouveau et traumatisant qu’il découvre? 

Connu sous le nom de « Shamo » au pays du Soleil Levant, Coq de Combat est un Seinen (manga pour adulte) mêlant plusieurs genres tels que la critique de société et les arts martiaux. En premier lieu la froideur et le réalisme des scènes et des situations dans lesquelles se trouvent les personnages. La truculence des dessins montre la cruauté existant au sein d’un pays dans lequel on ne soupçonnerait pas de telles choses pouvant se produire. On retrouve Ryô dès le début du premier tome forcé à mettre dans sa bouche le pénis d’un prisonnier jouant les caïds. Les agressions contre lui vont bon train et il ne trouve aucune parade pour se défendre.
Jusqu’au jour où il voit qu’avec sa force, il peut vaincre ceux qui l’humilient, et lui font subir les pires brimades. C’est ce jour qu’il découvre le Karaté. Un sport sain, qui tournera ici en véritable « lutte à mort ». Le respect des arts martiaux est tâché, avec son apprentissage du Banryu-kai, par le vieux détenu Kurokawa. Le Banryu-kai est une sorte de karaté sans règles. On peut mordre l’adversaire, le frapper dans les parties sensibles, lui crever les yeux, et même le tuer. Désormais Ryô ne laissera aucune chance à ceux qui se mettront en travers de son chemin. Toute la prison aura peur de lui, il se battra contre tout le monde et ira même jusqu’à frapper le directeur de sa prison le jour de sa sortie.
Après deux années de prison Ryô est libéré et commence une nouvelle vie. Seulement le Ryô peureux du premier tome n’est plus. Désormais Ryô a grandi, il a muri, s’est formé, et surtout? il sait se battre. Pour gagner sa vie, on le voit se prostitué, vendre son corps et ses services à une grosse dame riche, laide et vicieuse. Seulement ça ne l’intéresse plus, il veut rechercher sa sœur Natsumi. Il la retrouve devenue prostituée. Il n’arrive pas à la faire sortir de ce milieu, et le Ryô noir que l’on commence petit à petit à découvrir, s’enfonce davantage dans le malsain.
Puis un soir, il regarde à la télévision le tournoi du Lethal Fight, où les plus grands champions de tous les sports de combat s’affrontent. Sa passion pour le Banryu-kai, et son envie de devenir le plus fort lui reviennent. Il désire devenir tout puissant et remporter un jour ce tournoi. C’est alors qu’il se rebelle contre ses protecteurs, ceux qui lui trouvaient des gens chez qui il pouvait aller jouer aux gigolos. Ceux-ci finissent par accepter son envie de se surpasser, et lui envoient une sorte de compagnon-mentor censé leur retranscrire les moindres faits et gestes de Ryô.
L?histoire prend alors une bouffée d’oxygène, avec ce nouveau personnage, on sent un Ryô moins solitaire et moins sûr de lui qu’on ne pourrait le croire. Aussi ce personnage connu sous le nom de Tôkichi, apporte une minuscule touche d’humour au récit. Il accompagne Ryô partout où il va, mais celui-ci passe son temps à trainer dans des quartiers difficiles à se battre contre des gens qu’il trouve faibles. Il lui faut un meilleur adversaire, quelqu’un de plus fort. La chasse aux experts en arts martiaux peut alors commencer? 

 

 

Vous pouvez remarquer sur les couvertures de ces trois premiers tomes la transformation du personnage de Ryô. C’est avec un trait très réaliste et très détaillé que le dessinateur Akio Tanaka peint son œuvre. La descente aux enfers du personnage de Ryô a su être admirablement retranscrite. Au fur et à mesure des tomes, l’ambiance devient de plus en plus sombre, et le héros s’enfonce dans le mal. En analysant ces trois couvertures, on décèle beaucoup d’éléments pouvant nous indiquer ce qu’il se passe dans le volume sans même l’avoir lu.
Ainsi sur la première image Ryô semble chétif, il a un visage triste, qui touche le lecteur. On a pitié de lui et on se demande ce qu’il a. La couleur bleue, connue pour être une couleur froide, montre le désarroi du protagoniste, et le milieu sinistre dans lequel il se trouve dans ce tome, à savoir la prison.
Sur la deuxième couverture, on a un Ryô sûr de lui, il apprend à maitriser le Banryu-kai dans ce volume et fait la loi dans la prison. Son visage, sans aucun sourire, est baigné dans une lueur obscure et rouge, comme le sang. On est loin du Ryô enfant gâté, qui, à 16 ans, a tué ses parents.
Enfin sur la troisième couverture, on atteint des sommets. Le mal est entièrement ancré en Ryô, ce n’est plus de la colère qui se lit sur son visage, mais de la démence. Il a la tête couverte d’une capuche noir, comme un tueur de la nuit.
Cette descentes aux enfers et ce passage dans le côté obscur ne va pas sans rappeler la saga Star Wars. On a le sentiment d’avoir à faire à Anakin Skywalker, en regardant les couvertures de ces trois tomes. Mais ne nous éloignons pas du sujet principal. ^_^ 

 

Un joli coup de pinceau et un bon scénario font un bon manga en général. Seulement un manga qui a pour but de sévèrement critiquer la société japonaise, comme le fait Coq de combat, est aussi un manga qui suscite certaines polémiques.
Tout d’abord les nombreuses scènes violentes où l’on ne lésine pas sur les flots de sang qui giclent, pourront heurter certaines âmes sensibles. Ensuite, les scènes où le sexe est explicitement reporté, du sexe sale, voir même sadique, en choqueront plus d’un. La réalité des situations et le franc parler des personnages nous font oublier que nous sommes dans un manga. Or certaines personnes furent choqués d’apprendre que ces monstruosités existaient dans le vrai monde. Et ils ne le reconnurent pas, d’où un véritable partage des positions sur ce sujet au Japon.
Les sentiments n’existent quasiment pas dans ce manga, on se trouve ému à quelques passages, mais jamais très longtemps. Et si au départ, les combats semblent être la seule excuse donné par les auteurs pour attirer le lecteur, on voit vite que chaque personnage est profondément étudié. Ainsi, en avançant dans la lecture, on en apprend sur le passé de ces personnages, puis on en découvre de nouveaux, à qui on s’attache, comme Naoto Sugawara, contre qui Ryô fera un magnifique combat à mort à partir du neuvième tome. Et alors on constate que pour ces jeunes en pleine réinsertion, dont parlent les auteurs, il devient trop difficile de survivre. Les seules issues semblent être la mort par suicide, la folie ou le meurtre. Tout est très noir, et même trop noir par moment. Tokyo ressemble à un ghetto géant où rien n’est beau, tout est moche, où les stars et personnes riches vivent heureux ensemble, et où tous les pauvres et autres trafiquants vivent reclus, dans l’obscurité, attendant la nuit pour passer à l’action. Il y a un véritable fossé entre Coq de combat et les autres Seinen du même genre. Rarement on n’a été aussi touché, aussi marqué, après la lecture d’un manga. On en sort avec plein d’idées en tête, on se pose des questions, on se demande si le monde dans lequel on vit est vraiment comme cela. Mais à aucun moment on ne souhaite quelque chose pour le héros, et là se trouve tout le génie des auteurs. Pas une fois, mis à part au début du premier tome, on ne voudrait que Ryô réussisse les magouilles qu’il entreprend de faire. On est toujours du côté des personnages secondaires, ceux que l’on connaît à peine, voir pas du tout.
Ainsi, Akio Tanaka et Izo Hashimoto ont réussi leur pari. Ils ont réussi à faire de « Shamo » un manga qui choque l’opinion publique de par son réalisme et sa violence, qui critique la société, et qui plait aux fans du genre.
Du grand art ! 

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Commentaires

Portrait de Docteur Spider

faut vraiment que je lise ce manga !

"Les hommes ont une femme, mais les femmes n'en ont pas." Proverbe féministe

je te le conseille trop, je l'ai découvert l'été dernier, ça a été ma grosse surprise ^^
tu regretteras rien c'est clair 

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